L’association nationale A.R.B.R.E.S a classé l’orme de Gorbio parmi les deux cents arbres remarquables de France. Par ce classement, l’arbre symbole du village, appartient désormais au patrimoine collectif et nous lui souhaitons de résister aux assauts du temps qu’il brave depuis près de trois siècles.
Nous avons demandé au maire de Gorbio un commentaire sur l’orme de son village, il nous a écrit:
» La date de sa plantation en 1713, correspond à une date historique et l’on peut se demander s’il n’y a pas une relation, à l’ instar des arbres de la liberté, avec le traité d’UTRECHT, en cette même année, où le comté de NICE et Gorbio avec, passeront sous la souveraineté bienveillante du Duc Victor Amédée de Savoie qui obtenait en plus le titre de Roi de Sicile.
Car le vieil orme a été le témoin non seulement de générations de gorbarins, mais aussi de nombreux conflits, parce que le village était situé sur un axe important, ancienne voie romaine, entre Sospel et Nice.
Il a pu assister, notamment, à une terrible bataille entre les Gallispans (troupes franco-espagnoles) qui tenaient le Village le 13 octobre 1746 et les Austro-Sardes qui s’ouvrirent par leur victoire à Gorbio les portes de la ville de NICE.
Durant la révolution française il a pu voir les troupes des Marseillais brûler devant lui sur la Place du village, les meubles, tableaux et archives des comtes de Malaussène et il aura certainement vibré lorsqu’à quelques mètres de lui les occupants allemands en Septembre 1944 firent sauter le dépôt de munitions dans le bar qu’ils avaient réquisitionné pour les entreposer!
Plus récemment en Janvier 1996 le vieil orme aura vibré différemment aux accents de la chanson « Falling into you » de Céline DION qui tournait son clip à quelques mètres, sur une place transformée en camp de gitans!
Mais l’orme de Gorbio a eu aussi, dans le passé, une dimension symbolique, puisqu’au XVIIIe siècle il réunissait autour de lui les représentants de toutes les familles de la commune qui y tenaient conseil : et les décisions engageant l’avenir y étaient prises à « main levée », chacun étant l’égal de l’autre, et le dicton en vieil italien disait :
« tout homme sous l’orme est un homme » INTERO » ( traduction : fort de tous ses droits)
Aujourd’hui la tradition rituelle continue, et le banc de pierres qui l’entoure reste le lieu privilégié des rencontres et des échanges de vues.
Pour revenir sur des considérations d’ordre botanique, il faut savoir que les ormes sont menacés depuis le premier quart du XXe siècle par le champignon CERATOCYTISULM et par un coléoptère gourmand de son aubier
Si le champignon qui s’attaque au coeur de l’arbre n’a pas eu raison du vieil orme, c’est peut-être tout simplement parcequ’il est creux!
Au début du siècle l’arbre atteignait plus de vingt mètres et faisait de l’ombre jusqu’au porche d’entrée du village.
L’orme a été écimé a plusieurs reprises entre les deux guerres, car il présentait un risque pour la population, puis la maladie s’en est mêlée qui n’en a pas eue raison ; mais le vieux géant n’est pas immortel et devra faire l’objet d’un soin particulier, même si ce n’est que pour quelques années car désormais il est un » patrimoine national « ! »
(sources et documentations : archives des comtes de Malaussène
Roland Ghersi S.A.H.M
Gorbio « images de son passé » de Marcel LOTTIER)